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Yann, paraplégique, dans «Ma vie d’après»: «Je veux donner de la motivation aux autres»

La série documentaire « Ma vie d’après » se poursuit le samedi sur France 3. L’occasion de faire connaissance avec ce sportif dont un accident de la route a changé le destin. C’est notre témoin de la semaine.

PourCiné-Télé-Revue

« Le 29 septembre 2019, le Yann d’avant est mort et le nouveau Yann est né. C’était pourtant une journée normale, un dimanche très, très pluvieux, un match de foot, un retour en voiture avec les copains. Sauf qu’au bout de cinq minutes de trajet, à cause de l’aquaplanning, le conducteur a perdu le contrôle. La voiture a glissé, fait des tonneaux et on s’est arrêtés contre un arbre. Impossible pour moi de sortir de la voiture explosée, mes jambes ne bougeaient plus… En fait, ma colonne vertébrale s’est fracturée au niveau T12 – le bas du dos – et la vertèbre T12 est venue sectionner la moelle épinière.

« Le lendemain, à l’hôpital, j’avais des douleurs atroces dues aussi à des côtes cassées, la nuque ouverte. Le chirurgien est entré dans la chambre et ce moment a été pire que celui de l’accident. Il m’a appris qu’il m’avait opéré pendant la nuit et que je ne remarcherais jamais.

« Passé le choc, je me suis dit que j’allais me battre pour remarcher, convaincu que la médecine pouvait se tromper. Au début, je me suis battu contre les médicaments, pour ne pas m’endormir toutes les 15 minutes. Ma rééducation, je l’ai envisagée comme j’envisageais le sport. Tous les matins, je me réveillais comme si je commençais un match de foot et je me fixais un petit objectif avec mon kiné. En une semaine, j’avais perdu douze kilos de muscles. Cela n’a été que de petites victoires de jour en jour. Au bout d’un mois et demi, j’ai réussi à m’asseoir : une épreuve. J’avais l’impression d’être en lévitation.

« L’autre choc a été la première fois que je me suis assis dans un fauteuil roulant. Quand je me suis vu dans le miroir, amaigri, pâle, les yeux cernés, fatigué, dans ce fauteuil, cela a été atroce, je retenais mes larmes. Arrivé dans ma chambre, j’étais tellement sans force que je me suis écroulé sur le matelas, et devant l’infirmière et l’ergothérapeute, j’ai ressenti doublement une sensation d’échec. Je me suis mis à pleurer toutes les larmes de mon corps pour la première fois depuis l’accident. Le lendemain, je me suis résolu à aller de l’avant. Petit à petit, j’ai repris de la force, repris confiance. Je ne m’acceptais plus du tout. J’avais peur d’être totalement dépendant des autres. Et je l’étais. Pour la moindre des choses, j’avais besoin des autres. Psychologiquement, cela fait mal.

« Comme je me l’étais promis, je suis sorti du centre de revalidation – un an et quatre mois après mon arrivée – debout. J’ai réussi à remarcher avec des orthèses et un déambulateur. Le sport m’a sauvé ! Cela a été compliqué de reprendre ma vie de tous les jours. Dans la rue, se déplacer avec le fauteuil sur les trottoirs, des revêtements cabossés, face à des gens qui ne se décalent pas, et subir les regards qui jugent, de pitié, de compassion et les commentaires dits dans mon dos, cela a tellement été difficile à encaisser que je me suis interdit de sortir en ville pendant deux mois.

« Pour ma compagne, cela a été atroce aussi. Elle m’a vu dans des états pas possibles. Et elle vit le handicap avec moi tous les jours. Notre maison de ville à plusieurs niveaux n’était pas du tout adaptée à mon état. Elle doit m’aider au quotidien pour une série de choses et subit aussi le regard de pitié des gens.

« Je me suis rendu compte que pour la majorité, une personne en situation de handicap est incapable et dépendante. C’est faux ! En tant que paraplégique, je peux voyager, faire plein de sports, me balader, aller en soirée, conduire. C’est pour changer ce regard sur le handicap que j’ai créé un compte Instagram, yann_favelas. Quand j’étais au centre de revalidation, les exemples sur les réseaux sociaux de personnes en fauteuil qui ont des vies formidables m’ont aidé. À mon tour de donner de la motivation aux autres.

« En juin dernier, aux sélections des Jeux paralympiques à Paris, j’ai été retenu pour quatre sports, dont le tennis. Une coach m’a repéré, j’ai intégré un club. Mon but est de faire des compétitions pour arriver en équipe de France. Je n’aurais jamais pensé faire ce sport mais là, je me dépasse physiquement et je retrouve ces sensations que je n’avais plus éprouvées depuis deux ans, quand on va chercher loin en soi. Depuis mon accident, je sais la chance que j’ai de vivre. Du coup, je profite plus des petits moments et de mes proches. »

« Ma vie d’après », 9 octobre, 15h15, France 3.

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