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«#JeSuisLà»: avez-vous le nunchi?

Alain Chabat apporte toute sa bonhomie naturelle à cette fausse comédie sur le jet-lag existentiel et le besoin de renouer avec soi-même… en Corée du Sud.

PourCiné-Télé-Revue

Restaurateur dans le Pays basque, Stéphane semble aller parfaitement bien. Séparé, il a le sentiment d’être proche de ses fils. Quand il découvre qu’en fait il les connaît mal et que sa vie, au fond, ne le satisfait plus, Stéphane décide, sur un coup de tête, de rejoindre en Corée du Sud une femme avec qui il converse régulièrement via les réseaux sociaux. Mais arrivé à l’aéroport de Séoul, il doit déchanter. La femme en question n’a nullement l’intention de le rencontrer en vrai. Pour leurs retrouvailles après l’irrésistible « Prête-moi ta main », Alain Chabat et le réalisateur Eric Lartigau nous gratifient d’un film, drôle et triste à la fois, parcouru de ce spleen du jet-lag et de l’entre-deux-âges déjà magnifié par Bill Murray dans « Lost in translation », réalisé par Sofia Coppola. Sa correspondante ne venant pas, notre héros grisonnant reste en rade dans l’aéroport, incapable de le quitter, comme en panne. Il devient malgré lui une star locale, une excentricité, jusqu’à ce que le vernis craque. Il faut tout le talent et la bonhomie naturelle d’Alain Chabat pour avoir envie de suivre jusqu’au bout ce personnage. Mais arrivé au bout de cet étrange voyage immobile, on n’en a aucun regret !

L’histoire paraît folle, pourtant, comme déjà « Le terminal » de Steven Spielberg, elle est inspirée d’un fait authentique. Il y a quelques années, un ressortissant suédois s’est envolé pour la Chine, afin de convoler avec une jeune femme qu’il ne connaissait que via Internet. Arrivé sur place, il s’aperçoit que l’heureuse élue lui a posé un lapin. Plutôt que de rentrer dépité chez lui, il entame une grève de la faim. Elle durera une semaine, avant qu’il ne soit rapatrié dans son pays.

« J’ai trouvé cette histoire et ce parcours captivants, car ils disent quelque chose de la possible et absurde virtualité vers laquelle peuvent conduire les réseaux sociaux. C’est la porte ouverte au fantasme, à la possibilité d’un amour trop idéalisé », racontait Eric Lartigau à la sortie du film. L’exemple suédois est loin d’être unique. En Corée du Sud, où les milliers d’adeptes de l’Eglise de l’Unification acceptent comme moitié les candidats proposés par la secte, c’est chaque mois que des candidats au mariage via les réseaux sociaux se retrouvent Gros-Jean comme devant à l’aéroport.

Le secret du bonheur

Le film évoque aussi le « nunchi », le « secret du bonheur » coréen qui renvoie à la capacité d’écouter et de décoder les émotions de l’autre sans qu’il ait à les formuler et d’agir en conséquence. Avoir le nunchi, c’est développer une forme de sagesse, faite de discernement et de patience, où il est question avant tout de prendre son temps pour observer l’autre et son environnement, au lieu de courir tête baissée dans le mur comme on aime le faire chez nous.

« #JeSuisLà », 17 janvier, 20h40, la Une.

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