Accueil Ciné-Télé-Revue Cinéma

Claude Lelouch, soutien indéfectible d’Ary Abittan, accusé d’agressions sexuelles: «Je veux croire que c’est une histoire qui a mal tourné»

À 84 ans, le légendaire cinéaste entame une trilogie avec « L’amour c’est mieux que la vie », en salle ce 19 janvier. Une histoire où la mort qui rôde n’empêche ni l’amour, ni l’humour, ni l’amitié de s’offrir une dernière danse. Mais la sortie du film est bousculée par l’affaire Ary Abittan, un de ses héros.

PourCiné-Télé-Revue

Désireux d’offrir une fin de vie agréable à leur meilleur ami malade, deux hommes engagent une prostituée pour lui faire connaître sa dernière histoire d’amour. Mais toute professionnelle qu’elle soit, elle ne tarde pas à s’éprendre réellement de ce client pas comme les autres, qui ignore tout de la manigance, et au début lui fait comprendre qu’il est trop près du tombeau pour encore pouvoir se permettre d’y croire. Au bout de quelques jours de bonheur, elle décide de lui dire la vérité, que leur histoire, aussi brève soit-elle, ne se passe pas dans le mensonge… Autour de Gérard Darmon et de Sandrine Bonnaire, Claude Lelouch, 84 ans, fait un pied de nez à la mort avec « L’amour c’est mieux que la vie », premier volet d’une trilogie explorant sa propre filmographie, en salle dès ce 19 janvier.

Sandrine Bonnaire joue ainsi Sandrine Massaro, fille de Lino Massaro et Nicole… héros de « L’aventure c’est l’aventure », campés par Lino Ventura et Nicole Courcel ! La mémoire de « La bonne année », des « Uns et des autres » est aussi conviée – avec d’ailleurs la dernière apparition à l’écran de Robert Hossein. On ne changera plus Lelouch, et ce film aligne certains de ses poncifs et tics (comme la chanson du titre serinée à longueur d’images), qui horripileront les détracteurs du cinéaste. Pour les autres, la légèreté qu’il affiche pour aborder la fin de vie en se servant de sa propre expérience (le film se passe même dans sa maison) devrait les séduire. Il n’y a qu’avec lui que convoquer sa propre filmographie dans un nouveau film ne passe pas pour de la prétention mais simplement pour une bonne idée.

«L’amour c’est mieux que la vie», aussi court soit-il pour Gérard Darmon et Sandrine Bonnaire. © Paradiso
«L’amour c’est mieux que la vie», aussi court soit-il pour Gérard Darmon et Sandrine Bonnaire. © Paradiso

Jean-Louis Trintignant sera d’ailleurs le héros du 2e volet, « L’incroyable fertilité du chaos ». Et quand, l’interviewant dans son « Club 13 », à Paris on lui demande si, en bonne logique, le héros du troisième volet n’aurait pas dû être Jean-Paul Belmondo, il nous répond : « Bien sûr, Jean-Paul Belmondo sera dans le troisième, et Johnny et Bernard Tapie. Ils ont fait partie de ma famille. Il y aura aussi Françoise Fabian, Nicole Garcia, tous les survivants seront là. J’avais envie de faire la fête avec moi-même et avec eux. Le cinéma est un peu une façon d’être éternel. Grâce à lui Lino, Jacques, Bernard, Johnny, Jean-Paul sont toujours bien vivants. Ils pètent le feu. » Ce sera peut-être l’occasion de voir les dernières images des « Bandits manchots », le film avec Bébel laissé inachevé en 2011, à cause de ses problèmes de santé.

« En faisant ce 50e film, j’ai eu le sentiment que je n’avais tourné qu’un seul film, que chacun des personnages appartenait à la même famille. J’ai le sentiment d’être plus un metteur en vie qu’un metteur en scène. Les hommes et les femmes que j’ai fait tourner pendant soixante ans ne sont ni des superhéros ni des supersalauds, mais des êtres humains avec les défauts de leurs qualités. Ils sont peut-être un rien moins dégueulasses que les autres, capables pendant cinq minutes d’être des héros, parfois d’être des salauds. Mon scénariste, c’est la vie, à l’imagination absolument incroyable », ajoute Claude Lelouch. « Je sais aussi très bien que je tourne mes derniers films et je veux avec eux mettre un peu au propre ma vie de cinéaste et d’homme, pour mes enfants et mes petits-enfants. Leur faire part de ce qui m’a le plus impressionner dans la vie. Et c’est qu’aimer est mieux que vivre… Dans la vie, les choses ne se passent jamais comme on les a imaginées. C’est toujours un peu plus ou un peu moins. Un peu plus, c’est le début du bonheur, un peu moins, le début des emmerdes. Je sais aujourd’hui que l’amour a donné un sens à ma vie. Chaque fois qu’on est capable d’aimer quelqu’un d’autre un peu plus que soi-même, on est heureux. Je suis conscient que la vie est une course d’emmerdements au pays des Merveilles, mais heureusement il y a l’amour, et l’humour. Ce sont les deux plus belles des merveilles ! Sans humour, il n’y a pas d’amour possible. Ils vont ensemble. L’amour a besoin qu’on se moque de temps en temps de lui. Et puis, derrière, il y a la roue de secours extraordinaire qui est l’amitié. C’est moins bien que l’amour mais c’est plus résistant ! »

Claude Lelouch, à 84 ans, se lance dans une trilogie. © Isopix
Claude Lelouch, à 84 ans, se lance dans une trilogie. © Isopix

La mâle amitié est au cœur du récit. Gilles Lellouche et Ary Abittan sont ces deux potes de toujours qui « offrent » ce dernier plaisir à Gérard Darmon, tandis que Kev Adams joue son fils. On fait remarquer à Claude Lelouch que les héros de son cinéma, Lino Ventura, Jacques Brel, Jean-Paul Belmondo, Johnny Hallyday, Bernard Tapie, sont des hommes plutôt machos, décalés par rapport à aujourd’hui. Un contraste d’autant plus criant qu’entre-temps, Ary Abittan s’est retrouvé accusé de viol et se retrouve blacklisté – on a même demandé à Lelouch de le supprimer de son film, ce qu’il a refusé tout net. « Je suis triste pour lui », nous répond le cinéaste. « Il traverse un cauchemar sans nom, que je ne souhaite pas à mon pire ennemi. C’est une mort sociale et professionnelle. Pour l’instant, je veux croire que c’est une histoire qui a mal tourné, parce que, dans la vie, c’est un garçon charmant, drôle, talentueux. Ce serait dommage qu’une bêtise quelle qu’elle soit puisse endommager toute sa vie, ce serait trop cher payé. Je compte sur la justice pour nous permettre de comprendre pourquoi le pire est arrivé. »

Un cas isolé à ne pas confondre avec ses machos à lui : Brel, Ventura, Hallyday, Bébel… « C’était des hommes qui aimaient les femmes, et quand ils les aimaient, les protégeaient totalement. Quand mon père s’est marié, il n’a pas voulu que ma mère travaille. Il disait : « C’est à moi à m’occuper de toi. » Ce n’est plus comme ça aujourd’hui. Aujourd’hui, quand un couple va au restaurant, il partage l’addition. Jamais je ne l’aurais supporté. C’est mon côté macho. Mais à côté d’elles, on est des enfants. Les femmes, ce sont des hommes réussis. Je leur dois tout. Elles ont des vies d’avance sur nous. Je suis un homme à femmes parce que j’ai conscience qu’elles nous sont supérieures. » Retrouvez l’entièreté de son interview dans votre Ciné-Télé-Revue.

A lire aussi

Voir toutes les news